Informatique-Industrielle

Le Big Data plein de promesses pour l’industrie

Ce phénomène est une priorité pour la France
et il fait l’objet d’un des « 34 plans de la nouvelle France industrielle ».
Qu’est-ce que c’est ? Comment ça marche ? Explications avec trois
spécialistes de la donnée, depuis sa récolte jusqu’à son traitement.

 

Big
data : ces deux mots sont sur les lèvres des industriels du monde entier.
Et la France, bien sûr n’échappe pas à la règle. De quoi s’agit-il ?
«  Le big data, c’est une multitude de données qui sont aujourd’hui
disponibles et qui peuvent être partagées et utilisées dans tous les systèmes »,
déclare Jean-Benoît Nonque, vice-président de l’éditeur Infor. Et si ce nouveau
concept est très tournée sur le grand public, avec des données principalement
issues du web et d’objets connectés, les industriels sont conscients qu’ils peuvent
en tirer parti. « Quand on veut gérer au mieux ses activités, on a besoin
d’avoir un nombre de données important car c’est dans la corrélation de données
qui proviennent d’environnements diverses qu’on arrive à tirer les meilleures
stratégies et à être le plus efficace possible. Cette donnée qui est désormais
disponible, il faut donc la récolter, mais aussi en tirer des enseignements et
aider les utilisateurs à améliorer leurs processus et leurs façons de
travailler », poursuit-il. Parler d’un « big data industriel » a
d’ailleurs désormais du sens. « Dans l’industrie, il y a quelques années,
un simple équipement comme un moteur ou une vanne ne remontait que quelques informations.
Aujourd’hui, il est de plus en plus intelligent, de plus en plus instrumenté et
va remonter des dizaines ou plus d’informations qu’il va falloir enregistrer,
traiter et ensuite restituer. Pour se faire une idée, si l’on prend 100
informations qui proviennent de nos équipements, qu’on les enregistre chaque
seconde et que l’on veut les garder pendant un mois, on va générer 259 millions
d’enregistrements, soit une dizaine de Go de données », note Eric Poupry,
directeur du département M2M chez Factory Systèmes.  

Chez
National Instruments, spécialisé dans la mesure et l’analyse des données, on
parle de « Le Big Analog Data ». « Ce sont toutes les données
qui proviennent d’un environnement physique quel qu’il soit : de la
nature, de phénomènes électriques, d’une machine… toutes ces données qui sont
issues de la numérisation des signaux », explique Anthonin Goude,
ingénieur produits pour l’embarqué chez l’Américain. Parmi ces informations,
certaines devront être récoltées à des fréquences relativement lentes, au-delà
de la seconde, d’autres à des intervalles beaucoup plus courts ; certaines
devront être traitées en temps réel, d’autres à Posteriori. Mais dans tous les cas,
là encore, les chiffres donnent le vertige. « Une turbine instrumentée,
c’est environ 20 To de données générées par jour et par unité. Il suffit de
multiplier par le nombre de turbine que l’on peut trouver et l’on envisage bien
ce qu’est le Big Analog Data… », précise-t-il.

 

Des bouleversements dans l’offre

Ces
informations temporelles, transactionnelles ou d’environnement deviennent donc
vite innombrables, et « on commence à parler de Big quand les outils
d’exploitation de ces données doivent être différents des outils conventionnels »,
commente Eric Poupry. Qu’est-ce que cela change pour les fournisseurs de
solutions, tout au long de la chaîne ? Chez national instruments, plus
spécialisé dans l’amont du processus, « sur les niveaux inférieurs, nous
bénéficions d’une compétence dans l’acquisition et l’analyse. En revanche, pour
traiter ces amas de données, il nous faudra développer des partenariats, par
exemple avec des fournisseurs d’infrastructures réseau ou de solutions de
stockage, du cloud, etc., qui ne font pas partie de la compétence de base de
NI ». Pour Infor, « en tant que société de gestion on doit être
à même de récupérer ces données, de proposer à nos clients de les exploiter
dans des modèles efficaces. Par exemple en maintenance, cela se traduit par le
fait de passer d’interventions systématiques à des interventions conditionnées
à l’état réel des équipements, comme c’est le cas dans l’automobile. Il nous
faut aussi analyser ces données de façon à être impactant sur les actions,
donner la bonne information aux utilisateurs en fonction de leur métier et surtout
de leur donner les moyens d’intervenir efficacement. Cela nécessite, en tant
qu’éditeur, d’avoir une infrastructure qui permettra de collecter ces données,
d’analyser ces données et de ramener le fruit de cette exploitation auprès des
utilisateurs au moment où ils en ont besoin », commente Jean-Benoît
Nonque. Cela passe notamment par des technologies comme le cloud. Chez Factory
systèmes, enfin, le big Data a impliqué de revoir l’offre et l’organisation de
la société. « Sur notre activité « logiciel », [Factory systèmes
est distributeur de Wonderware en France, Ndlr] nous proposons désormais des outils
d’archivage de masse, des data historians qui sont capables d’aller récolter des
millions d’informations en parallèle, sur un site ou un ensemble de sites
industriels. Sur la partie « matériels », nous avons créé 5 grands
piliers qui permettent d’assurer à un niveau industriel la collecte des informations,
la communication jusqu’à un système qui doit la traiter avec des moyens
conventionnels comme le réseau ou la 3G, mais aussi des moyens moins
conventionnels comme des réseaux basse fréquence, l’exécution de l’information,
sa distribution à tous les exploitants et, enfin, la sécurisation de l’information
à chaque maillon de la chaîne », détaille Eric Poupry.

 

Essentielle cybersécurité

Dans ce
contexte de partages tous azimuts, la cybersécurité devient en effet essentielle.
A chacun ses solutions. « Les sources de données sont de plus en plus importantes
et pour un département informatique cela devient de plus en plus complexe
d’assurer la sécurité globale. On doit aller chercher des informations à des
endroits divers et variés et la redistribuer à des utilisateurs qui sont
également éparses. C’est la raison pour laquelle certaines sociétés passent par
le cloud car ils s’appuient dans ce cas sur d’autres sociétés comme Amazon ou Microsoft
pour garantir ces niveaux de sécurité indispensables dans certains métiers »,
note Jean-Benoît Nonque.

Sur le plan
industriel, la tâche est particulièrement ardue. « L’industriel est
décontenancé par le fait que ces systèmes peuvent être attaqués et que cela
peut avoir un impact sur la conduite des procédés et leur sécurité. Il y a un
travail énorme à réaliser, et on en est au tout début, car les systèmes
qu’utilisent aujourd’hui les industriels ont pour la plupart 5 ans, 10 ans, 20
ans ou plus et on ne concevait pas il y a 5 ou dix ans les systèmes industriels
pour résister çà une attaque informatique », note Eric Poupry. Reste aussi
à définir ce qu’est une donnée critique et pour qui elle est critique…

Qu’il soit
tiré par une approche marketing ou tout simplement imposé par un constat de la
nécessité de gérer de plus en plus de données, le Big Data arrive au gallot. Que
manque-t-il pour le mettre en œuvre efficacement au niveau industriel ? Pas
grand-chose. « Au niveau de la récupération de l’information, le niveau
capteur, et celui des nœuds d’acquisition, des solutions existent. En revanche,
nous aurons besoin de solutions nouvelles sur au niveau des infrastructures
réseau », déclare Anthonin Goude. Mais la vraie difficulté et ailleurs.
« La plupart des organisations industrielles sont décontenancées par la disponibilité
de plus en plus d’informations par le biais des capteurs, des systèmes et des
outils informatiques dont ils disposent. Et il y née parfois une difficulté au
niveau des gens qui vont devoir utiliser cette infirmation… », note Eric
Poupry.

Selon
Jean-Benoît Nonque, c’est ainsi l’aspect organisationnel qui constitue le frein
le plus important. « Les entreprises sont généralement organisées par silos,
alors que l’on parle d’un projet global qui va unifier différents services par
rapport à une information qui doit être partagée. Actuellement si l’exécutif
d’une société ne prend pas en main le projet de Big Data, on va encore se
confronter à des département qui gèrent une partie de la donnée ». Ces
freins, il va falloir les lever vite, car si un grand nombre d’industriels ne
sont pas véritablement lancés dans des projets dans ce domaine, « beaucoup
évoquent le Big Data dans les point d’amélioration de certains processus »,
prévient le vice-président d’Infor.

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