AutomatismeRobotique

Le préhenseur, transposition industrielle de la main

Impossible de mettre en
fonction un robot industriel, s’il
n’est pas équipé d’un dispositif
de préhension lui permettant
de manipuler des objets. Il
existe différentes technologies
de préhenseurs qui vont de
la pince aux manipulateurs
magnétiques avec une
tendance forte en ligne de
mire : la flexibilité.

Depuis la nuit des temps, la
main est pour l’humain à la
fois le plus efficace, le plus
fiable et le plus précis des outils dont il
dispose. Elle lui donne l’habileté qui lui
a permis de créer et d’exploiter tous
les objets usuels dont il a su s’entourer
et ce, quel que soit le niveau de développement
de la société dans laquelle
il se réalise.

Il calque aujourd’hui les capacités
dont la nature l’a doté au niveau des
machines qu’il développe. Il faut par exemple, que les systèmes automatisés
et les robots disposent de fonctions
logiques entrantes et sortantes mais
aussi, d’une certaine puissance de
calcul leur permettant de réaliser des
branchements déductifs avant que
demain, de réels systèmes reposant sur
l’intelligence artificielle leur permettent
de réagir à des situations inhabituelles.
Un premier pas marquant semble avoir
été franchi cette année avec la mise au
point d’un programme informatique
capable de rivaliser avec l’intelligence
humaine dans le jeu de stratégie le plus
complexe jamais imaginé : le Go.
Mais la logique ne peut pas tout. Il
faut pour interagir avec l’environnement
être en mesure de manipuler
des objets. C’est précisément ce
que l’on attend au niveau le plus
élémentaire d’un robot industriel.
Sans rabaisser les exploits réalisés
par les ingénieurs en matière de
robotique collaborative, il faut bien
qu’à l’extrémité d’un bras robotisé,
on trouve une pince permettant
répétitivement de saisir des objets
pour les déplacer, les positionner,
les assembler, les trier, les rejeter,
etc.

Qu’il soit de type cartésien, hexapode,
poly-articulé à un, voire deux bras
ou Scara, le préhenseur remplit le
rôle d’interface mécanique ou même,
mécatronique entre le robot et l’objet
qu’il est en chargé de manipuler.
Chaque préhenseur doit être adapté à
l’application en garantissant la fiabilité
de la prise et celle du maintien jusqu’à
la dépose de l’objet. En ce sens, le
préhenseur a un impact direct sur la
performance de la cellule robotisée
qui l’utilise.

Dans un grand nombre d’opérations
de manutention, le préhenseur est
spécifiquement adapté à la fois à
l’application et au produit. Il est
cependant possible d’introduire un
certain niveau de flexibilité à une
telle unité de production, en équipant
l’extrémité du bras robotisé d’un
équipement permettant de changer
l’outil ou le préhenseur automatiquement.
Il existe à cette fin, différentes
approches mais toutes complexifient
la cinématique de la production. Il faut
aussi intégrer la durée du changement
et éventuellement, l’étalonnage du
préhenseur dans le temps de cycle
global. L’immobilisation de plusieurs
outils et préhenseurs inutilisés pendant
parfois de longue période, pèse de plus
sur le coût de la solution.

Différentes techniques de préhension
sont actuellement disponibles pour
s’adapter aux besoins et aux produits.
Ainsi, le préhenseur s’accommode de
la variabilité géométrique du produit à
condition qu’il présente des similarités au
niveau de ses caractéristiques physiques
comme sa dureté, sa rugosité, etc.

Les différentes
technologies de
préhenseurs

Les préhenseurs pneumatiques sont
extrêmement utilisés pour accomplir
des mouvements linéaires ou
rotatifs. Ils sont alimentés par de
l’air comprimé, une énergie réputée
coûteuse en raison des pertes importantes
qui découlent de sa production
mais aussi de son transport et ce,
même en présence de fuites micrométriques.
Un réseau de distribution
d’air comprimé nécessite donc une
surveillance périodique rapprochée
et des opérations de maintenance
qu’il faut intégrer dans le coût global
de la solution.
Le préhenseur pneumatique est
souvent une simple pince à deux positions
: elle sera ouverte ou fermée.
L’ajustement de la force de serrage
s’effectue en contrôlant la pression
d’air comprimé. De tels préhenseurs
reposent sur une conception simple
qui garantit un long cycle de vie. Ils
sont aussi faciles à mettre en oeuvre
et d’un prix d’achat relativement
faible puisque fabriqués en grande
série. Leurs caractéristiques de
montage peuvent être communes
à plusieurs famille de produits chez
un même constructeur. Parmi les
inconvénients fréquemment relevés
à leur encontre, on peut mentionner
l’encombrement et la nécessité
d’immobiliser les pièces afin qu’elles
puissent être saisies par le préhenseur
avec précision.

Pour sa part, un préhenseur électrique
est actionné par un, voire
plusieurs moteurs électriques…
d’où son appellation. Comme les
préhenseurs pneumatiques leur
utilisation principale réside dans
l’accomplissement de déplacements
linéaires ou rotatifs mais avec la
capacité d’adapter facilement par
programmation, l’amplitude de la
fermeture et de l’ouverture de la
pince. De tels préhenseurs ont
en revanche une force de serrage
limitée mais ils peuvent facilement être équipés d’un capteur qui va
permettre d’ajuster la force et la
vitesse de serrage. Ils sont donc
largement utilisés dans les applications
qui requièrent une certaine
précision. Notons encore qu’il est
à la fois aisé de distribuer l’énergie
électrique et d’en maîtriser les
pertes.

On peut remarquer une tendance
forte qui est apparue depuis plusieurs
mois chez certains grands concepteurs
de préhenseurs tels que Schunk.
Certaines pinces de forme et de
puissance équivalentes peuvent être
proposées soit en version électrique,
soit en version pneumatique avec des
caractéristiques de montage absolument
similaires, ce qui rend ces pinces
totalement interchangeables. Notons
encore que certains fournisseurs tels
que Destaco, proposent des préhenseurs
à trois doigts couvrant un plus
large éventail d’applications.

Et aussi
l’aspiration…

D’autres types de préhenseurs
sont plus largement répandus dans
certaines applications ou dans
certains secteurs. C’est le cas des
préhenseurs par aspiration que
l’on rencontre dans la manutention
d’emballage et la palettisation. Ils
s’appuient sur un vide d’air créé
au moyen de l’effet Venturi pour
aspirer des bacs, des plateaux,
des cartons, voire des barquettes
de produits frais dans l’industrie
agro-alimentaire. Un préhenseur
à aspiration est composé de
blocs comportant une ou plusieurs
ventouses. Ces dernières sont
conçues avec des matériaux qui ne
laisseront aucune marque sur les objets déplacés. La forme et la puissance de la dépression
qui donnent à la ventouse son efficacité, doivent être
parfaitement adaptées aux produits manipulés.

Globalement, il s’agit de préhenseurs de conception
relativement simple donc peu coûteux, et qui s’adaptent
à la forme, à la taille et à la matière des produits. Il
est possible de réaliser un préhenseur par aspiration
de grande taille capable de déplacer plusieurs objets
similaires en une seule opération pour par exemple,
compléter plus rapidement le remplissage d’une palette
en y posant des cartons par groupes. En revanche, de
tels préhenseurs sont inadaptés à la manipulation de
produits présentant des surfaces grillagées, ouvragées
ou perforées.

D’autres préhenseurs exploitent un flux d’air comprimé
capable de générer une dépression au niveau d’une
ventouse. Un tel préhenseur est d’une conception
simple et donc peu coûteux. Il est de surcroît capable
de s’adapter à un grand nombre d’états de surface en
modulant la pression d’air comprimé le plus généralement
entre 1 et 7 bars. Il est possible de saisir ainsi des
surfaces faiblement poreuses ou irrégulières mais aussi
des matières fragiles. Bien sûr, la force de levage réelle
peut dépendre des états de surface et de la matière de
la pièce à transporter mais il est presque impossible
d’obtenir une mesure de la qualité de la prise réalisée.
En détournant le principe précédent, Festo a créé une
variante que l’on peut qualifier de préhenseur à ventouse
déformable. Les ingénieurs de cette entreprise se sont à
cette fin, inspirés de la manière dont la langue d’un caméléon
saisit une proie (voir Jautomatise n°105). Il existe
différents type de préhenseurs déformables utilisant de
l’air comprimé ou du vide pour gonfler une poche en
élastomère ou pour compresser des matériaux granulaires
autour de l’objet à manipuler. Ces préhenseurs
présentent l’avantage d’une grande flexibilité qui leur
permet de passer d’un objet à un autre quelles que soient
leurs formes et leurs tailles pour peu que les poids soient
eux comparables. Ils ne peuvent en revanche être utilisés
que pour déplacer des objets légers et les différences
éventuelles de taille et de forme rendent la dépose dans
la zone de réception, relativement imprécise.

La préhension
magnétique

On identifie au moins deux types
de préhenseurs magnétiques.
D’une part, il y a ceux qui sont
constitués d’aimants permanents
associés à un dispositif assurant la
séparation mécanique de la pièce
manipulée. De l’autre, on trouve
des préhenseurs électromagnétiques alimentés par une source
d’énergie électrique. C’est la
coupure de cette alimentation qui
provoque la libération de l’objet.

Ces types de préhenseurs ne
peuvent évidemment manipuler
que des objets contenant des
métaux ferreux. Ils requièrent que
la surface de contact soit propre
et surtout, qu’elle soit exempte
de graisse. Le champ magnétique
diffusant dans un volume important,
il y a le risque de voir des
poussières ferreuses voire des
copeaux polluer la surface de
contact du préhenseur ou même,
adhérer à la pièce transportée.
Une telle situation rendra les
déplacements rapides relativement
périlleux voire dangereux pour
les équipements qui pourraient
se trouver dans la trajectoire au
cas où la pièce se détacherait du
préhenseur.

Un choix qui pour
l’essentiel, tient du
bon sens

S’agissant d’une manipulation qui
s’effectue à partir d’un robot qu’il
soit ou non collaboratif, cela nécessite
de tenir compte de quelques
éléments globaux.

Evidemment, la taille des pièces à
manipuler permet de dimensionner
celle de la pince qui sera utilisée.
Mais elle conditionne aussi la taille
de la zone qu’i faut libérer autour
de la pièce ainsi que le couple de
serrage appliqué par le préhenseur.
La forme de la pièce ajoute
des contraintes supplémentaires
à l’adaptabilité du préhenseur qui
peut avoir à s’accommoder de
courbes et d’angles mais aussi d’un
centre de gravité plus ou moins
déporté. Lors du calcul de la force
de serrage, il faut tenir compte des
obligations de maintien lors des
accél&ea
ute;rations opérationnelles mais
aussi de ce que seront les nécessités
lors d’un arrêt d’urgence.

Un autre élément très important
qui ne doit en aucun cas être
négligé est le poids transporté.
Dans le choix d’un robot, il faut
évidemment sélectionner une
capacité de charge adapté qui
tiendra compte à la fois du poids
de la pièce la plus lourde susceptible
d’être manipulée mais aussi
– et c’est une évidence parfois
négligée – du poids du préhenseur
choisi.

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