Tous les deux ans, Munich fait un pied de nez
à Hanovre et sa gargantuesque Foire dédiée
aux industriels, en devenant pour une courte
semaine, la capitale sinon mondiale, du moins
européenne, de la digitalisation des processus
de production. Du 19 au 22 juin dernier, le
chef-lieu du Land de Bavière a abrité la dernière
édition du salon Automatica au sein de la
München Messe.
Selon les organisateurs, quelque 46 000 que pour l’édition précédente – se sont pressés quatre jours durant, dans les six halls de l’exposition, pour découvrir ce qui se visiteurs – 20 % de plus
fait de mieux en matière d’automatisation comme on pourrait s’y
attendre si l’on se réfère au nom même de l’évènement. Depuis
plusieurs années, cette exposition est en quelques sorte scindée en
deux grands blocs : d’un côté, les automates et les PC industriels dédiés
au contrôle et à la commande des processus et de l’autre, les halls
spécialement consacrés à la robotique industrielle sous toutes ses
formes.
Pour l’édition de cette année, les organisateurs auraient aussi bien
pu rebaptiser l’événement, Robotica 2018, tant ces machines étaient
omniprésentes. Si l’on croisait bien tous les grands noms dans les trois
halls réservés à l’automatisation, force est de constater que la robotique
tenait làencore, le haut du pavé avec des stands, abritant des contrôleurs
spécialement conçus pour la synchronisation des opérations au sein
des cellules multi-robotiques ou pour la constitution de dispositifs de
sécurisation périmétriques pour des espaces de travail collaboratifs
homme-machine.
Les technologies de pointe que sont, l’intelligence artificielle, l’Internet
des objets, les « big data » ou datamasses, les clouds publics ou
privés, conduisent la production industrielle à évoluer vers ce que
l’immense majorité des acteurs présents à Automatica 2018 appelle,
« l’automatisation intelligente ».
EFFICACITÉ, FLEXIBILITÉ ET AVANTAGE
CONCURRENTIEL
L’un des facteurs de croissance décisifs pour accroître la rentabilité des
installations industrielles européennes, réside dans la connectivité entre
les machines et le seul moyen d’y parvenir, consiste à standardiser les
interfaces de communication. L’importance de la collaboration entre les
différents acteurs de la chaîne de création et de partage des données de production, a été démontrée par l’association VDMA
Robotics + Automation, en s’appuyant sur le standard
OPC UA .
« OPC UA est le standard désigné pour permettre
aux machines de parler la même langue dans l’usine
intelligente du futur », a déclaré le Dr Horst HeinolHeikkinen, président de l’Initiative VDMA OPC
Vision. La pile logicielle OPC UA est de plus en plus
reconnue dans la construction mécanique et l’industrie
manufacturière. Cette interface logicielle ouverte
qui est compatible avec de nombreux systèmes
d’exploitation, garantit une compatibilité indépendante
du fabricant en permettant des échanges de données
standardisés entre systèmes hétérogènes au travers
des réseaux numériques.
Pas moins de trente et une entreprises parmi
lesquelles figuraient, Codesys, Festo, Fraunhofer, Hahn
Automation, Isra Vision, Kuka, Schunk, Weis Robotics,
Yaskawa ou encore, Zimmer, ont œuvré à la mise en
place d’un démonstrateur mettant l’accent sur deux cas
d’usage. La cellule exposée est une unité entièrement
automatisée, intégrant une table d’indexation, des
axes et des préhenseurs, des robots et des systèmes
de vision industrielle. Hébergée dans le cloud, la
surveillance des conditions de fonctionnement permet
de surveiller toutes les données concernées en temps
réel sur un tableau de bord.
UN SUJET CENTRAL :
LA COLLABORATION
La robotique collaborative est en train de conquérir
le marché à un rythme soutenu en ouvrant des
possibilités d’automatisation presque illimitées. De la
sonde jusqu’au robot collaboratif, l’interaction directe
entre l’humain et la machine est de mieux en mieux
acceptée dans l’industrie.
Les développements technologiques sont dus à
une étroite collaboration entre les scientifiques et
les industriels. Munich est le point de rencontre
international pour cela. Le professeur Oussama
Khatib de l’université de Stanford située au sud de
San Francisco en plein cœur de la Silicon Valley, a
expliqué : « Automatica 2018 ouvre une large fenêtre
sur les applications émergentes dans le secteur de
la robotique. Des robots dotés de capacités accrues
et travaillant plus près des humains sont en train
d’être construits pour des applications réelles, ce qui
témoigne de la collaboration fructueuse et du transfert
de technologie entre la recherche et l’industrie. »
Et dans tous les halls consacrés à la robotique, le
cobot était bien le centre de toutes les attentions.
En effet, il n’est pas un seul constructeur de robots
industriels qui ne possède désormais un ou plusieurs
modèles d’équipements collaboratifs à son catalogue.
Dans un large espace aménagé sur son stand, Stäubli
faisait la démonstration que l’interaction directe entre
l’homme et la machine est désormais possible, en
s’appuyant notamment sur ses robots industriels de
la gamme TX2. Selon ce constructeur, l’utilisation de
robots à 6 axes classiques, apporte des avantages
significatifs en termes de performance, de productivité
et de coûts, comparativement à l’utilisation de robots
à la cinématique exclusivement tournée vers les
applications collaboratives.
A cela s’ajoute désormais, le robot mobile HelMo. Fonctionnant de
manière totalement autonome, cet équipement est capable de se
déplacer dans un large éventail d’environnements de production pour
rassembler les consommables, les pièces ou les assemblages qui lui sont
nécessaires pour accomplir les tâches pour lequel il est programmé. Dans
l’espace de démonstration, un robot mobile HelMo naviguait de manière
autonome, reliant les cellules robotisées pour effectuer des tâches
intralogistiques tout en démontrant ses capacités d’interaction directe
à l’homme. Selon Stäubli, il s’agit du prochain niveau de collaboration
entre l’humain et la machine.
NAISSANCE D’UN ÉCOSYSTÈME
La robotique collaborative est bien plus qu’une niche de la robotique
industrielle comme en témoigne le succès d’Universal Robots qui
disposait d’un stand de belle taille et bien en vue dans le hall 4. Avec
les bras à six axes UR3, UR5 et UR10 qui permettent de manipuler une
charge totale allant de 3 kg à 10 kg, cette société danoise se taille la part
du lion auprès des entreprises industrielles qui engagent une démarche
de rationalisation des postes de travail et d’amélioration des processus
de production.
Les équipements proposés par Universal Robots sont conçus pour
manipuler et positionner des objets sur de courtes distances pour venir
en aide à un opérateur ou supprimer une tâche répétitive sans valeur
ajoutée. Le succès de cette entreprise montre que ce que d’aucuns
considéraient comme une simple niche, est bien un marché à part
entière.
Autour des bras Universal Robots, se développe un véritable écosystème
de fournisseurs d’équipements complémentaires plus ou moins dédiés.
Schunk qui fait figure de pionnier sur le marché des préhenseurs dédiés
à la robotique collaborative, dispose de modèles exclusivement adaptés
aux cobots Universal Robots. La toute nouvelle société OnRobot,
créée par l’un des fondateurs historiques d’Universal Robots s’engage
dans une voie similaire en proposant avec OptoForce, des capteurs
de force s’intercalant sur le poignet des bras UR3, UR5 et UR10 ainsi
que des préhenseurs mécaniques, magnétiques ou à succion. Autre
société danoise, Mobile Industrial Robots (MIR) tout comme la société
taïwanaise Castec International développent des solutions robotiques
collaboratives mobiles en partenariat étroit avec Universal Robots.
Reste qu’un tel succès n’est pas sans faire de jaloux, ni exciter les
convoitises et susciter les vocations. Autre cofondateur d’Universal
Robots parti voler de ses propres ailes, Kristian Kassow qui dirige
aujourd’hui… Kassow Robots. Cette autre société danoise de robotique
collaborative, va lancer plusieurs modèles de bras collaboratifs
nativement capables d’évoluer dans l’espace sur 7 axes. Automatica 2018
a été l’occasion pour le public de découvrir ce nouvel acteur qui compte
bien séduire les industriels avec l’extraordinaire simplicité de mise en
œuvre et de programmation de ses produits qui ne requièrt aucune
connaissance en robotique.
LE SOLEIL SE LÈVE
À L’EST
Aucune entreprise chinoise ne figure parmi
les précurseurs de la robotique collaborative
puisque les premiers jalons ont été posés par
le japonais Fanuc et les européens ABB, Kuka,
Stäubli et Universal Robots.
Pour l’édition 2018 d’Automatica, la société
Doosan Robotics a par sa présence, tenu à
rappeler que la Chine est une grande nation
industrielle avec laquelle il faut compter jusque
dans les secteurs où excellent les technologies
de pointe.
En disposant ses robots collaboratifs à 6 axes,
autour d’un véhicule aux lignes agressives,
cette entreprise tendait à montrer qu’il
existe encore dans l’industrie automobile,
une foule d’applications prêtes à s’ouvrir
aux technologies les plus prometteuses de
l’Industrie 4.0. Doosan Robotics dispose déjà
d’un catalogue comptant quatre bras capables
de transporter de 6 kg sur une course de 1,70 m
à 15 kg sur une course de 0,90 m. En outre,
certains modèles sont spécialement conçus
pour résister aux environnements difficiles.
Tous les modèles peuvent être programmés au
moyen d ‘une tablette tactile mais ils peuvent
aussi être équipés en option, d’une interface
de commande intégrée sur le corps du bras
et qui permet à l’équipement d’apprendre
directement les trajectoires que lui montre
l’opérateur en le guidant manuellement. Du
côté de la flexibilité, Doosan Robotics propose
une base mobile qui permet de déplacer
facilement le robot collaboratif d’un poste de
travail à un autre.