Innovation et normalisation sont souvent
opposées dans l’esprit du public et des chefs
d’entreprise. En favorisant l’interopérabilité et
la compatibilité des équipements entre eux, la
normalisation contribue en réalité à la diffusion
de l’innovation. En robotique collaborative, la
France apporte sa pierre à l’édifice.
Préoccupation majeure lors de la mise en place des robots
industriels, la sûreté des personnes et des installations a
conduit à l’élaboration de normes strictes préconisant
l’obligation d’installer des barrières de sécurité et des
interrupteurs de fonctionnement afin d’interdire toute
interaction physique entre l’homme et ces machines.
Les automaticiens ont donc l’obligation de concevoir des
applications qui ne laissent aucune place aux risques, en
prévoyant des arrêts de sécurité et des procédures de
redémarrage strictes.
La robotique collaborative remet en cause, un grand nombre
des principes ayant cours jusqu’à présent puisque cette fois,
l’homme et la machine partagent un même espace de travail et,
agissent de concert et en interaction physique directe pour
accomplir leur mission.
La diversité des cas d’applications, des conditions de mise en
oeuvre et des éléments de sécurité intervenant dans la gestion
de la sécurité, explique la variabilité des nouvelles situations de
travail ainsi que les différentes typologies de solutions
techniques rencontrées. Afin d’intégrer au mieux la diversité de
ces dernières et de permettre à la France d’affirmer son
influence en matière d’innovation en robotique industrielle,
l’Alliance Industrie du Futur propose plusieurs domaines dans
lesquels il est nécessaire de faire évoluer le référentiel de
normalisation existant ou d’en élaborer un nouveau.
La sécurité préoccupation
majeure des instances
normatives
Du fait de son évolution et de son expansion rapide, la
robotique s’est récemment vu reconnaître en tant que domaine
technologique d’importance stratégique. Elle dispose désormais
de son propre comité technique indépendant qui, depuis fin
2015, a donné naissance à l’ISO/TC 299 dont le secrétariat a été
alloué à la Suède (SIS). Si ce comité traite les aspects liés aux robots en tant que produits, le comité technique ISO/TC 199
s’occupe des aspects transversaux couvrant la sécurité des
machines avec un secrétariat dévolu à l’Allemagne (DIN).
Chacun de ces comités se subdivise en groupes de travail (WG)
ou en groupes de travail joints (JGW) lorsque les réflexions sont
menées à la fois par des équipes de l’ISO et de l’IEC.
Par exemple, on peut noter que dans le comité technique ISO/
TC 299, le WG 3 travaille sur la sécurité industrielle et le JWG 5
sur la sécurité pour la technologie robotique.
Dans le comité ISO/TC 199, la plupart des groupes de travail ISO
ou joints ISO-IEC interviennent sur des aspects qui peuvent
impacter la sécurité des robots collaboratifs : le WG 5 réfléchit
aux principes généraux pour la conception des machines et
l’évaluation des risques, le WG 6 intervient sur les distances de
sécurité et les aspects ergonomiques, le WG 8 travaille sur les
systèmes de contrôle sécurisés ou encore, le WG 12, créé en
juin dernier, oeuvre pour sa part sur les interactions entre
l’homme et la machine ; un sujet qui est au coeur des
préoccupations de la robotique collaborative.
Des références apportant
un cadre opérationnel
Depuis 2011, le fonctionnement collaboratif des robots
industriels est décrit au travers des normes ISO 10218-1,
orientées vers la conception de la quasi-machine et ISO 10218-2
portant sur l’intégration et l’utilisation du système robotisé.
Depuis février 2016, la spécification technique ISO/TS 15 066
vient compléter les normes précédentes, en donnant des
éléments nouveaux pour le fonctionnement des robots.
En complément, des travaux sur la caractérisation de la notion
de contact entre parties mobiles des machines et l’homme sont
en cours, au travers du projet de norme NWIP 21260. Celui-ci
vise à élaborer une norme générale applicable à tout type de
machines sur les données mécaniques de sécurité pour les
contacts physiques entre l’homme et la machine. C’est
précisément la mission qui a été confiée au groupe ISO/TC 199
WG 12 précédemment évoqué.
En France, trois axes de recommandations font consensus pour
encadrer l’utilisation de systèmes robotisés à usage collaboratif.
Ceux-ci sont présentés par ordre de priorité. Des échanges sont
en cours avec le Ministère du Travail dans le cadre d’un groupe
de réflexion rassemblant des organismes de contrôles, les
organisations professionnelles, des fabricants, des intégrateurs,
des utilisateurs, etc.
Bien que les normes harmonisées ISO 10218, volet 1 et 2 ont été
complétées depuis février 2016 par une spécification technique
référencée ISO/TS 15 066, une prochaine étape de travail
devrait viser à une caractérisation approfondie du
fonctionnement collaboratif.
Il conviendrait de poursuivre l’enrichissement de l’état de l’art
en développant la problématique de l’évaluation des seuils de
sécurité lors d’éventuels contacts. Le projet de norme NWIP 21
260 (données de sécurité mécanique pour les contacts
physiques entre parties mobiles des machines et les personnes) devrait notamment avoir pour objectif la clarification des
valeurs de seuils de sécurité exploitables et l’aide à la
caractérisation des contacts.
Il existe un réel besoin pour un protocole de mesure
permettant d’évaluer les paramètres de sécurité intrinsèque.
L’objectif est d’avoir à disposition une méthode d’étalonnage
permettant de justifier la calibration des efforts et des énergies
du robot industriel utilisé dans une application collaborative.
De plus, cette méthode pourrait constituer un outil de
validation de l’intégration ainsi qu’un moyen de contrôle
périodique.
Des travaux menés conjointement par le Cetim et le CEA List
sont actuellement en cours sur l’élaboration d’un protocole de
mesure adapté à toutes les marques de robots industriels. Ils
pourraient constituer une base de départ pour l’élaboration
d’un document normatif.