Le 16 octobre dernier, B&R Automation,
l’Université Lyon 1 et plusieurs partenaires organisaient à Lyon une journée
technique intitulée « Open robotics pour l’industrie 4.0 ». Son but :
expliquer au monde de l’éducation ce que peuvent apporter ces deux concepts à
l’industrie de demain.
L’industrie
4.0 n’intéresse pas que les industriels purs et durs. Ceux qui feront tourner
les usines de demain aussi cherchent à savoir ce que ce terme représente et ce
qu’il va changer dans leur futur environnement de travail. Pour preuve, la
journée technique organisée par B&R Automation avec l’Université Lyon 1 et
trois partenaires industriels : le roboticien Comau Robotics, le
spécialiste de la pneumatique et de la mécatronique Festo et le fabricant de
solutions de vision Cognex, a réuni pas moins de 120 participants sur le campus
de la Doua le 16 octobre dernier. Au programme, des présentations sur les
solutions qui font déjà l’industrie connectée d’aujourd’hui, des témoignages
d’industriels et un show-room permettant de se familiariser avec ces
technologies nouvelles.
La communication au cœur du concept
Lorsque l’on
demande à Stéphane Potier, responsable marketing de B&R Automation France
ce qu’est exactement l’Industrie 4.0, la réponse est claire : « c’est
l’annonce d’une quatrième révolution industrielle avec l’idée d’avoir des
usines intelligentes et connectées », explique-t-il. Cela imposera
naturellement l’interconnexion entre les machines et entre les composants des
machines : capteurs, actionneurs et automates. Pour le responsable
marketing, certaines technologies actuelles y sont particulièrement adaptées.
« La première technologie est OPC-UA [pour Unified Architecure,
architecture unifiée, Ndlr], un standard d’interopérabilité qui peut être
utilisé dans les systèmes ERP, MES ou Scada et, maintenant, dans les automates,
voire dans les capteurs », détaille-t-il. Cette technologie permet ainsi
de communiquer de manière verticale depuis les ERP et MES vers les machines et réciproquement
mais aussi, grâce à PLCopen, de manière horizontale entre deux automates. L’un
sera alors OPC server et l’autre OPC client. Une communication également
possible entre des automates de constructeurs différents. Cette technologie a
donc un grand avenir, même si elle ne conviendra pas pour des communications
temps réel et si, manifestement, la compatibilité avec l’OPC classique n’est
pas forcément garantie… Pour les communications temps réel, Stéphane Potier
préconise naturellement le réseau de terrain Powerlink, capable d’assurer les
flux importants entre les automates (quel que soit le constructeur) et les
capteurs et actionneurs de manière déterministe et temps réel. Dernier point
essentiel, la sécurité de l’ensemble. Dans ce domaine, « il faut une
technologie ouverte pour assurer la communication au sein d’une machine mais,
surtout entre différentes machines dans une entreprise, voire entre site, car
dans ce cas la sécurité sera obligatoirement multiplateforme et multiconstructeur.
Opensafety est parfaite pour cela puisqu’il s’agit d’une technologie ouverte, Opensource,
qui peut être intégrée dans n’importe quel type d’environnement matériel et
logiciel et par n’importe quel constructeur », commente Stéphane Potier. A
noter, cette technologie est déjà employée par 3100 OEM dans le monde.
Open Robotics, quesaco ?
Outre
l’industrie 4.0, cette journée abordait le concept de robotique ouverte. De
quoi s’agit-il ? « La robotique intégrée signifie que le robot est
une partie de la machine. Il n’y a plus de frontières entre le robot et le
reste de la machine et ils fonctionnent de façon synchronisée et partagent la
même zone mémoire. Cette solution autorise le niveau le plus élevé de
personnalisation, en termes d’IHM [interface homme-machine, Ndlr], syntaxe ou
fonctions robotiques », explique Tomas Prchal, technology manager CNC
& Robotics chez B&R Automation. Les technologies mises en œuvres dans
ce concept ? « Nous proposons un matériel universel et évolutif et
les fonctions particulières de robotiques sont obtenues grâce à un logiciel
modulaire et réutilisable. L’autre point important est la communication via
Powerlink. C’est une communication temps réel basée sur Ethernet qui permet
d’utiliser aussi bien des concepts de motion centralisée et
décentralisée », poursuit Tomas Prchal. Avec l’avantage de pouvoir piloter
les robots, mais aussi le reste des machines : freins des presses,
cellules multi-robots et architectures complexes. Une technologie utilisée
notamment par des constructeurs de machines comme les Allemands Trumpf et B+M
Surface Systems, mais aussi l’Italien Comau. En effet, depuis plusieurs années,
le roboticien emploie du matériel B&R dans ses baies de commande C4G et
C5G. A Lyon, il dévoilait l’étape d’après : une version « ouverte »
de son C5G.
Un contrôleur de robot 100% ouvert
« Pour faire de l’industrie 4.0, nous
avons besoin d’une nouvelle génération de robots. Mais il faut dès maintenant réfléchir
à comment on va la réaliser. Pour cela, il faut des plateformes de développement
suffisamment ouvertes et flexibles. C’est la raison pour laquelle Comau a
réalisé une version open, ouverte, de son contrôleur C5G, afin d’offrir aux développeurs des
environnements adaptés », commente Valentina Ferrara, ingénieur software chez le
roboticien italien. La différence avec un contrôleur classique ? Alors que
les baies classiques sont des boîtes noires qui ne peuvent communiquer que
difficilement avec l’extérieur, le C5G a été conçu pour être ouvert. Ce
contrôleur est ainsi associé, via une liaison Powerlink, à un PC externe APC
910 de B&R Automation, qui permet de faire le lien avec le monde
extérieur : capteurs, actionneurs, autres machines, etc., et qui peut générer
des trajectoires pour le robot, mais aussi prendre le contrôle complet du robot
réel, en communiquant à tout instant avec chacun des axes du bras. « Cette
configuration permet d’avoir les avantages des deux mondes, note Valentina
Ferrara. Elle autorise aussi les développeurs d’utiliser des logiciels
opensource, de mettre au point des interfaces vers les autres machines en
particulier les machines 4.0. » L’interface proposée par Comau est basée
sur le langage C ; il est donc aussi possible d’utiliser n’importe quel
langage pour programmer son robot. « Ce contrôleur est un pont entre le
monde de la recherche et de l’industrie. Avec ce pont, il devient possible de
transposer rapidement le résultat d’une recherche en milieu industriel »,
résume Valentina Ferrara. La preuve ? Comau l’a apportée le 16 octobre
avec une démonstration étonnante : un robot qui reproduit la posture d’un
homme, en passant par le capteur Kinect de Microsoft connectée au PC externe.
« Il faut souligner que cette application a été réalisée par un stagiaire.
En outre, cette démonstration emploie un capteur du commerce, mais nous pouvons
reproduire une application similaire avec des capteurs industriels », déclare
l’ingénieur Software.
Festo, professeur de 4.0
Une usine,
ce n’est pas que des robots et des automates. Dans bon nombre d’entre elles, on
retrouve quantité de composants mécaniques et pneumatiques. Et dans ce domaine
aussi, l’industrie 4.0 a des conséquences importantes. « Cela implique
davantage de communications entre les différents éléments, une remontée de
diagnostic efficace vers les automates et l’usage d’une intelligence déportée
au niveau des éléments automatisés, commente David Rosec, pilote technique chez
Festo. Dans notre offre, cela est incarné par le terminal CPX, qui comporte
notamment de nombreux nœuds communications via des bus de terrain pour
communiquer avec les automates. »
Festo propose
du matériel pour mettre en œuvre l’industrie 4.0 dans les usines, mais il
développe aussi des outils pour apprendre à maitriser ces technologies, via sa division
Didactics. « Nous proposons tout une gamme d’outils, dont la MPS Transfert
Factory, une mini-usine connectée composée de plusieurs éléments modulaires
adaptables selon les exercices et qui permettent de sortir un produit fini.»,
explique Simon Colas, responsable de Festo Didactics en France. Déjà utilisée
en Allemagne, la MPS Transfert Factory fait son arrivée en France. « Une
première machine a été livrée à Rouen en novembre », annonce Simon Colas. Autre développement de
Festo, le Tech2screen est une tablette (un iPad plus précisément) qui, associée
à une MPS Factory, permet aux élèves de visualiser de la réalité augmentée.
« Elle sert également de support pédagogique pour l’apprentissage des
métiers pédagogiques », commente le responsable de Festo Didactics France.
Pour cela, la tablette est montée sur une base que l’on peut connecter à des
éléments extérieurs via des fiches normalisées et qui peut simuler des
automatismes et des fonctions logiques. Enfin, Festo propose Robotino, un
composant de robotique mobile interfacé avec sa
mini-usine, qui assure le transfert d’une cellule à l’autre. « La programmation
des robots est assurée en source ouverte avec un logiciel Festo, Matlab ou
autre », note Simon Colas.
La vision, élément indispensable
Dans cette
chaîne qui relie tous les composants des installations industrielles 4.0, la
vision a une place de choix, puisque c’est elle qui garantit le contrôle à 100
des produits assemblés qui assure leur traçabilité. « La chaîne d’automation
n’a d’intérêt que si tous les appareils sont connectés entre eux et le temps
réel devient de plus en plus demandé, car les process sont de plus en plus
rapides. En outre la traçabilité permet d’augmenter les cadences de production
et la communication doit suivre », note Guillaume Paillissé, responsable
des ventes Sud France de Cognex. La vision doit donc partager des informations
avec différents systèmes : robots, automates, quel que soit le protocole
utilisé. Une voie pleine d’avenir dans ce domaine ? La vision 3D. « Nos
recherches se poursuivent dans l’acquisition et l’analyse des images en 3D pour
garantir un contrôle fiable, robuste et simple à mettre en œuvre, afin de
rendre ce monde accessible au plus grand nombre », commente Guillaume
Paillissé. Dernier développement en date de Cognex : le DS1000 (pour Displacement
Sensor), « des profilomètres avec une tête vision et la projection d’une
raie laser. On vient scanner l’espace, comme un scanner classique, pour recréer
l’espace en 3D. Cela permet d’aller plus loin que la 2D ne le permet, quand on
a peu de contrastes, des produits avec des géométries plus compliquées où l’éclairage
d’une caméra standard trouve ses limites. La 3D permet d’aller vers des
applications plus compliquées, mais tout en simplifiant des applications 2D,
voire en baissant les coûts », poursuit-il.
Après
Poitiers l’an dernier, où B&R s’était attardé sur la sécurité en robotique,
le spécialiste des automatismes à base PC avait choisi Lyon pour cette étape
dédiée à l’industrie 4.0. L’occasion pour les nombreux représentants du monde
de l’enseignement d’appréhender ces technologies nouvelles, mais aussi de
tisser des liens avec le monde industriel. Nul doute que l’on retrouvera
B&R et ses partenaires très bientôt lors d’une nouvelle étape en France.