Dans ses petites installations
« pilotes » ou ses lignes complètes, le Français mise sur un PC seul
ou relié à un automate. Un moyen de se libérer des contraintes liées aux
technologies propriétaires, de se différencier vis-à-vis de ses concurrents et
de gagner en souplesse et en pérennité.
Vous ne le
savez sans doute pas, mais lorsque vous buvez un verre de lait, que vous faites
frire des beignets dans l’huile, que vous faites le plein de lave vitre dans
votre voiture ou que vous vous lavez les mains au savon liquide, il y a de
fortes chances pour que le récipient que vous utilisez ait été rempli et bouché
par une machine Serac. En effet, depuis 1969, l’entreprise basée à la
Ferté-Bernard (Sarthe) est spécialisée dans les machines de remplissage et de
bouchage automatisé. Depuis sa création elle a installé plus de 5 000 solutions
de conditionnement dans le monde entier ! Leader en conditionnement aseptique,
par exemple pour le lait UHT, le groupe au
chiffre d’affaires de 120 millions d’euros en 2012/2013 – en progression
de 25 % et réalisé à 80 % à l’export – est présent partout dans le monde et
produit une centaine de machines par an, qu’il s’agisse de lignes complètes
capables de traiter 40 000 bouteilles par heure, notamment dans
l’agroalimentaire, ou de petites machines « pilote » destinées aux pays
émergents ou aux industriels cherchant à faire de la petite série ou du test.
On les retrouve dans quatre secteurs principaux : les produits laitiers, les
huiles végétales, les détergents et les soins de la personne. Sa filiale Nova,
près de Chartres (Eure-et-Loire), est quant à elle spécialisée dans le
conditionnement en pots préformés, en particulier pour les desserts lactés, les
crèmes et les yaourts.
Des machines pointues
Le groupe
possède six sites de production dans le monde, dont trois en France. A la Ferté
Bernard, l’usine historique de Serac fabrique des machines qui traitent tous
types de récipients, depuis le petit flacon de 100 g à 60 kg, fermé par un
bouchon classique ou spécifique. « Les machines sont conçues et assemblées sur
nos sites, testées à l’eau puis expédiées chez les clients pour y être
raccordées au reste de la ligne. », explique Dominique Ledru, Responsable
Communication. Il ne reste alors plus qu’à former les personnels sur place. Il
faut environ de 6 à 7 mois entre la commande et le remplissage de la première
bouteille.
Dans ce
domaine apparemment simple, entre les produits moussants et visqueux qui
nécessitent des verseurs particuliers, la grande diversité de types de bouchons
(classiques, bouchons doseurs, systèmes à gâchettes…), mais aussi les
conditions souvent extrêmes d’hygiène et de décontamination, les difficultés
sont nombreuses et une machine, même de petite taille, est un concentré de
technologie. Le petit plus des machines Serac, qui fait toute la différence ?
La technologie justement. D’abord, elles emploient une technique de remplissage
pondéral électronique propre à Serac. Dans ce domaine, le constructeur fait
jouer la standardisation. « Quel que soit le modèle, les machines utilisent la
même électronique, conçue ici », explique Nicolas Viennet, Responsable de
l’industrialisation de l’électronique. C’est le logiciel qui différenciera une
machine d’une autre. Pour les interfaces homme-machine également, Serac utilise
un programme maison : FCS + (FCS pour Filling Control System), disponible en
une vingtaine de langues. La partie bec de remplissage, en revanche, est
adaptée au produit manipulé. Par exemple, Serac a mis au point un bec de
remplissage «intelligent» baptisé Multiflow, qui assure une ouverture et une
fermeture progressive du bec, afin d’éviter la formation de mousse dans les
bouteilles. Une technologie qui lui a valu de recevoir un Oscar de l’emballage
lors de sa sortie.
PC inside
L’autre
grande particularité des machines Serac réside dans leurs cerveaux. Plutôt que
d’opter pour des automates traditionnels, le constructeur a en effet opté pour
des PC industriels. Ou plutôt un PC industriel. Pour des raisons de
standardisation et d’optimisation de son SAV clients, Serac a en effet choisi
un modèle bien précis : un PC Industriel shoebox spécifié et assemblé par les
équipes techniques de Factory Systemes. La machine embarque en standard Windows
XP Pro et l’IHM FCS+ et fonctionne avec un, voire deux écrans 15 pouces
tactiles. Elle utilise des slots PCI classiques, un port parallèle pour les
clés de licences, un ou plusieurs ports série et une ou plusieurs cartes
Applicom. Protégée contre les interférences électromagnétiques, elle embarque
également un graveur de DVD pour sauvegarder la configuration client et un
disque dur extractible en face avant, « pour simplifier la maintenance des
machines », commente Nicolas Viennet. Elle peut être associée à un
onduleur en option.
Le PC gère
donc la partie IHM mais aussi le reste de la machine. Pour les automatismes, «
ils sont gérés dans le PC par le logiciel d’automatisme ISaGRAF, associé au noyau
temps réel RTX. Pour les plus gros
modèles où les processus sont plus lourds, on ajoute un automate [Siemens ou
Allen Bradley, selon le choix du client, Ndlr] associé au PC via une carte
Applicom serveur », note Nicolas Viennet. Cette configuration permet ainsi de
travailler en toute transparence : le PC interroge l’automate sans être
lié à la technologie de ce dernier. La liaison avec l’électronique de dosage
est assurée par une liaison série RS 485. Alors que d’autres utilisent des
solutions du commerce, « nous avons développé notre logiciel, nos cartes de
commande de stations de dosage et notre firmware. Nous voulons absolument
maîtriser toute la chaîne du dosage qui est notre savoir-faire et notre point
fort face à nos concurrents », justifie Nicolas Viennet. Ces cartes sont
disposées dans des racks sur la machine, à raison d’une carte pour deux stations
de dosage. Enfin, le PC communique avec tous les autres capteurs via une carte
Applicom I/O avec des modules d’entrées/sorties Wago. « On peut avoir jusqu’à
400 entrées/sorties sur une machine », note le Responsable de l’industrialisation
de l’électronique.
Des avantages clés
Pour le
constructeur, l’utilisation de PC induit quantité d’avantages. D’abord, pouvant
embarquer six langues, il permet de basculer de l’une à l’autre en un instant.
Un détail capital pour des machines qui sont transportées au bout du monde.
Elles peuvent être assemblées par des français, exploitées par des coréens et
dépannées par des Malaisiens. De la même façon, l’opérateur ne voit jamais le
système d’exploitation du PC, mais ne communique avec son équipement qu’au
travers de FCS+. Avec le logiciel SUSIaccess présent dans tous les PC
d’Advantech, le constructeur peut aussi proposer des services de surveillance à
distance de ses machines. En outre, si une machine tombe en panne – ou qu’elle doit
être rétrofitée – il suffit de remplacer le PC en panne par un autre
réinitialisé avec la configuration du client, sauvegardée à l’usine de la Ferté
Bernard ou dans la filiale dont dépend le client. « Dans le meilleur des cas,
en quelques heures on peut changer un PC », assure Nicolas Viennet. Sur cet
aspect, la pérennité assurée de 3 à 5 ans pour les PC industriels est un autre
avantage important. Sur le plan opérationnel, « le PC offre plus de souplesse
qu’un automate et il nous permet de nous différencier de la concurrence », note
Responsable de l’industrialisation de l’électronique. Et surtout, « Nous sommes
maîtres de notre interface. Nous pouvons rajouter des fonctions à tout moment.
En outre, cela nous garantit une autonomie financière et matérielle vis-à-vis
de nos fournisseurs », poursuit-il.
Des évolutions à venir
FCS +, l’IHM
de Serac, est mise à jour généralement tous les ans, avec son lot de nouvelles
fonctions. « Nous opérons des évolutions perpétuelles, des petites choses, de
petites améliorations, et le développement de nouveaux services », commente
Nicolas Viennet. Le constructeur envisage également d’autres évolutions. Aller
encore plus loin dans la miniaturisation du PC industriel ? « Il y aurait une
limite car il faut loger les cartes et il nous faut pouvoir réaliser toutes les
configurations possibles avec le même PC », explique-t-il. En revanche, «
auparavant nos PC tournaient sous Windows NT. Désormais ils sont sous Windows
XP Pro et nous envisageons de passer sous Windows 7 », annonce le Responsable
de l’industrialisation de l’électronique. Mais cela se fera sous contrôle. «
Quand on change quelque chose dans un PC, nous validons tout, le matériel et le
logiciel. Cette validation peut prendre plusieurs semaines à plusieurs mois »,
explique-t-il. Les machines Serac n’ont donc pas fini de progresser.