L’ajout de fonctions à un produit ou à une machine implique une augmentation des coûts et peut donc être considéré comme un obstacle et non pas une opportunité d’augmenter le retour sur investissement. Toutefois, les technologies logicielles et matérielles de l’Internet industriel des objets (IIoT) inversent la logique conventionnelle liée aux coûts et aux bénéfices. En effet, les dépenses initiales sont minimes, tandis que les avantages immédiats et futurs sont significatifs. Rich Carpenter et Silvia Gonzalez d’Emerson expliquent pourquoi l’intégration de fonctions IoT dès les conceptions des machines devrait désormais être la norme.
Les utilisateurs finaux connaissent désormais très bien les capacités de l’IoT et demandent activement ces fonctions pour procéder à des améliorations opérationnelles et pérenniser leurs actifs industriels. La demande des utilisateurs finaux et l’opportunité qui se présente aux OEM (original equipment manufacturer pour fabricant d’équipement d’origine) de créer des offres différenciées et de nouveaux modèles commerciaux avec les clients, ont amené les OEM à la conclusion que les matériels et logiciels adaptés à l’IIoT doivent être intégrés aux nouvelles machines, pour une utilisation immédiate ou pas.
L’importance des données
Les OEM ont toujours intégré de nouvelles technologies et fonctions aux dernières générations de machines, mais la demande des clients en produits plus fiables et efficaces implique un changement radical des capacités. Il incombe donc aux OEM de concevoir des équipements qui offrent une gamme plus vaste de données opérationnelles, d’ajouter des instruments de mesure et de mettre en œuvre des améliorations capables de faciliter la connectivité.
Les utilisateurs finaux souhaitent obtenir davantage que de simples données brutes : ils recherchent des informations exploitables, disponibles localement ou à distance, et capables d’augmenter les performances opérationnelles. S’ils disposent des bonnes informations dont ils ont besoin, les utilisateurs peuvent tirer parti au maximum des fonctions des équipements, réduire l’utilisation de consommables et améliorer l’efficacité de l’opérateur, contribuant ainsi à augmenter la rentabilité tout en réduisant les risques.
À l’image de la plupart des entreprises, les OEM luttent pour minimiser les coûts et optimiser les bénéfices. Cependant, le coût de l’intégration des capacités IIoT aux machines, que ce soit par le biais de protocoles Ethernet connectés tels que Profinet, EtherNet/IP, Modbus TCP/IP, ou de solutions sans fil cellulaires, satellites ou industrielles telles que WirelessHART, est actuellement très bas et susceptible d’apporter une grande valeur aux utilisateurs finaux et aux OEM à l’avenir. C’est pourquoi l’intégration de l’IIoT devrait être incontournable. Cela exige des OEM qu’ils passent du développement de machines au coût le plus bas possible intégrant lors de la construction de machines« juste assez » de fonctions IIoT capables de répondre aux besoins changeants des clients et aux demandes futures grâce à des mises à jour logicielles. Cela est possible en utilisant des éléments matériels et logiciels ainsi que des solutions de mesure et de transmission de données qui permettent d’intégrer et d’analyser les informations émises par les dispositifs intelligents et les capteurs afin de fournir une vision opérationnelle plus globale.
Cela pourrait permettre d’effectuer un suivi de l’état de fonctionnement des équipements en utilisant les données recueillies auprès des capteurs de vibrations, des systèmes de détection des températures de paliers, des compteurs d’énergie, et des capteurs de pression d’air comprimé. L’intégration de ces informations offre aux utilisateurs une plus grande visibilité sur la santé de l’équipement, les avertissements de défaillances imminentes éventuelles des composants et les recommandations relatives aux exigences de maintenance.
Cette capacité de l’IIoT permet également aux OEM de créer de nouveaux flux de revenus en offrant aux clients des services optimisés de suivi et d’assistance. La location de matériel basée sur la production peut être quantifiée et les modèles commerciaux de machine en tant que service peuvent se concrétiser.
Le développement d’applications IIoT
Par le passé, l’incorporation de solutions de connectivité à distance dans les nouveaux équipements et machines était un processus onéreux et compliqué. Les API (application programming interface pour interface de programmation d’application), les interfaces homme-machine (IHM) et les technologies de mise en réseau se sont développés de manière significative au cours des dix dernières années. Cependant, malgré ces progrès, les premières applications IIoT exigeaient une coordination importante entre la gestion des données à grande échelle et l’analyse des technologies opérationnelles (OT) et des technologies de l’information (IT). La construction d’une véritable application IIoT exigeait également une programmation personnalisée, une connaissance des nouvelles technologies et la résolution de problèmes liés notamment à la connectivité.
Pour les utilisateurs finaux, il est important que les technologies IoT ne s’immiscent pas dans les API, IHM et infrastructures de réseau existantes, dont elles pourraient compromettre les opérations. Les applications IIoT doivent compléter les systèmes existants, tout en accompagnant les efforts pour optimiser la disponibilité des équipements, et améliorer les volumes de production et la gestion des stocks. Une amélioration de la connectivité entraîne une augmentation de la vulnérabilité face aux cybermenaces, ce qui appelle la mise en place de mesures strictes et efficaces pour protéger les entreprises. Les capacités de sécurité toujours actives, les réseaux privés sécurisés, la sécurité multicouche et les politiques de sécurité relatives au personnel doivent être sérieusement envisagés.
Complexité et coût réduits
Les normes et les structures et logiciels modulaires qui s’appuient sur les dernières technologies IIoT permettent désormais d’obtenir des solutions simples, rentables et sécurisées. Il existe de nombreuses manières d’intégrer des capacités IIoT axées sur l’Edge computing et sur des logiciels associés. Cependant, les solutions doivent pouvoir être standardisées et mises en œuvre aussi bien dans des situations anciennes que dans des contextes nouveaux, indépendamment de l’infrastructure existante.
Bien que les API standards puissent traiter certaines données IIoT, une nouvelle génération de contrôleurs Edge présente des caractéristiques informatiques dignes d’un PC, telles que celles requises pour les applications IIoT. Ces contrôleurs Edge offrent un contrôle déterministe fiable des équipements industriels, ainsi que des capacités IIoT. Ils constituent donc la plateforme d’automatisation privilégiée par les OEM en quête d’équipements pérennes, même s’ils ne sont pas encore en mesure de tirer parti des capacités IIoT. Lorsque les OEM seront prêts à mettre en œuvre les applications IIoT, les technologies requises seront déjà intégrées au cœur de la conception de leurs machines.
Les protocoles Ethernet industriel sont largement adoptés dans le secteur de la fabrication et le protocole de messagerie MQTT constitue désormais une méthode fiable pour communiquer des données de production vers le cloud ou d’autres applications IT. De nombreuses applications, telles que Node-RED et Grafana, remplacent le codage personnalisé. Elles sont capables de transmettre facilement les données de production et de les visualiser sous forme d’informations exploitables.
Les logiciels IHM accessibles sur Internet vont désormais au-delà de la visualisation de base en incorporant diverses fonctions IIoT. La visualisation sur Internet est idéale pour les applications d’analyse IIoT, qui requièrent généralement une visualisation de n’importe où. Par ailleurs, ces logiciels nouvelle génération sont très évolutifs et offrent une expérience de développement très cohérente pour les OEM. Ce mélange de fonctionnalité et de déploiement flexible est particulièrement avantageux pour les OEM, en particulier pour ceux qui fabriquent plusieurs types d’équipements.
De l’Edge computing au Cloud
Il existe une gamme d’options d’installation, notamment des contrôleurs Edge directement intégrés, et des dispositifs d’Edge computing reliés à des contrôleurs locaux et à des capteurs, à des PC situés dans les ateliers ou dans une salle de commande, ou à des serveurs dans le cadre d’un système d’automatisation plus important. Indépendamment du mode de déploiement, les solutions IIoT doivent être intégrées dans des systèmes accessibles depuis le cloud, en particulier si l’on souhaite visualiser et analyser les données d’un parc d’équipements distribués. Grâce aux communications avec le cloud, les OEM peuvent assister leurs clients dans le monde entier, tout en accédant aux informations susceptibles de les aider à améliorer les conceptions et la fiabilité de leurs propres équipements.
Le contrôle de l’Edge et la visualisation basée sur Internet élargissent la fonction d’automatisation en offrant des tableaux de bord des actifs qui fournissent des informations sur la santé de la machine, des sous-systèmes et des composants. Cela permet d’alerter plus rapidement le personnel d’exploitation et de maintenance en cas de problème, tout en mettant à sa disposition des données historiques permettant de mener une évaluation afin d’identifier les causes principales du problème. La transition numérique contribue à la collecte des données adaptées dans un contexte de résolution des problèmes amélioré, et de mise en place de stratégies de maintenance préventives et basées sur l’utilisation.
Les utilisateurs finaux ne sont plus disposés à tolérer un manque d’accès aux données et à la visibilité, surtout que les coûts initiaux d’intégration de telles fonctionnalités sont désormais relativement faibles. Ils sont tout à fait conscients des avantages à long terme d’un fonctionnement plus efficace et exigent par conséquent que les plateformes d’automatisation adaptées à l’IIoT deviennent la norme pour les aider à y parvenir.